Dienstag, 3. Februar 2009

Aspects juridiques et fiscaux des entités reconnues d'utilité publique au Luxembourg


Par Anne Canel et Wilfried Meynet*

Depuis quelques années et sur le modèle anglo-saxon, la philanthropie a le vent en poupe. La nouveauté est dans une implication plus soutenue des entreprises qui complète la générosité toujours plus importante des particuliers.

Les problématiques de développement durable et de responsabilité sociale des entreprises ont renouvelé l’intérêt du monde capitalistique pour la culture, l’humanitaire ou la solidarité.

De plus, outre l’effet de mode, la philanthropie ou plus largement le mécénat constituent désormais une source importante du financement des actions touchant à «l’intérêt général».

On assiste d’ailleurs progressivement, paradoxe pour ce secteur a priori non concurrentiel, à une certaine compétitivité entre les pays qui rivalisent d’ingéniosité et d’inventivité pour moderniser leur fiscalité et leur législation.

Etonnamment le Grand-Duché ne fait pas figure de leader en la matière , alors que son exemplarité demeure référente dans le plus emblématique des domaines philanthropiques, l’Aide au développement. Une comparaison avec nos voisins d’Europe et quelques pratiques françaises réussies permet d’ébaucher de premières suggestions de modernisation.


La fiscalité du mécénat à Luxembourg

Le tableau récapitulatif ci-après est révélateur des points de progression possibles du Grand-Duché, qu’il peut (grâce au pragmatisme qui caractérise son législateur) combler voire surmonter en sachant retenir le meilleur des réformes de ses voisins.

La situation actuelle est assez comparable à celle de la France avant sa grande réforme du mécénat. En effet, les particuliers et les entreprises ne sont pas vraiment incités à intensifier leurs dons de par la persistance de mécanismes juridiques et fiscaux anciens.


Quelques éléments du régime luxembourgeois actuel

Selon l’article 112 de loi du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu, sont considérés comme des dépenses spéciales et sont donc déductibles du total des revenus nets, les dons en espèces à des organismes reconnus d’utilité publique. La liste de ces destinataires autorisés est réduite et tenue à jour par l’administration des Contributions directes, qui reste le seul lieu centralisateur de cette information .

Pour être intégralement déductible de la base imposable, le don doit être compris entre 120 euros et 500 000 euros, et ne pas représenter plus de dix pour cent du revenu net annuel.

Il n’existe pas de possibilité de report ou d’étalement de l’avantage fiscal induit par le don en cas de dépassement de ces seuils . Cette situation vaut pour les personnes physiques comme pour les personnes morales .

Enfin, il appartient à chacun de faire figurer dans sa déclaration de revenu ces dons, pour obtenir a posteriori le remboursement d’impôt, car il n’existe pas de possibilité de porter les dons même récurrents sur la carte d’impôt.

A ces caractéristiques s’ajoutent l’obligation d’obtention d’un arrêté grand-ducal pour l’acceptation d’un don supérieur à 12.500 euros et la non-déductibilité des dons faits à des associations et fondations étrangères.


L’évolution du régime fiscal français

En France, le mécénat a pendant très longtemps été considéré avec suspicion voir défiance. Son régime fiscal était identique à celui du sponsoring (ou parrainage) qui lui s’analyse comme une prestation de publicité.

Cette confusion des genres explique en partie le désintérêt , à cette époque, pour le mécénat. Cependant, la réforme dite «Aillagon» (du nom du ministre de la Culture d’alors) bouleversa le paysage français, qui devint ainsi l’un des régimes les plus performant d’Europe.

Depuis sa réforme de 2003, le mécénat «à la française » se caractérise schématiquement par son «universalisme», son unicité et les avantages fiscaux qu’il procure aux mécènes.

En effet, selon le code général des impôts, les dons consentis à des oeuvres ou organismes d’intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial , culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture , de la langue et des connaissances scientifiques françaises, ouvrent droit à une réduction d’impôt sur le revenu ou sur les sociétés .

Ainsi, même si certaines conditions sont imposées (exercer ses activités dans un des domaines énumérés et être un organisme d’intérêt général), un très grand nombre des structures non lucratives (associations , fondations, …) peut bénéficier du mécénat sans qu’un texte de loi ou une reconnaissance administrative préalable ne soit nécessaire .

Comme le mécanisme de l’éligibilité de la structure bénéficiaire , celui des avantages fiscaux est identique que le mécène soit un particulier ou une entreprise.

Celui-ci pourra en effet, à l’appui d’un formulaire commun aux deux régimes, réduire son impôt d’une partie des dons qu’il a effectué selon un certain plafond mais en bénéficiant d’un report sur les cinq années suivantes en cas de dépassement.

Il est également important de noter que le mécène ne déduit plus ses dons de son revenu net mais de l’impôt qu’il doit payer . Cette évolution a permis de rendre plus «visible» et «quantifiable » les bienfaits fiscaux du mécénat et surtout de le distinguer clairement du sponsoring qui ne constitue qu’une dépense déductible.

De plus , le mécène a la possibilité non seulement de «signer» son opération et ainsi de faire apposer son nom ou son logo sur les documents de documentation de la structure destinataire des dons mais également de recevoir de celle-ci certaines contreparties limitées.

Par ailleurs, le don peut être financier, mais également concerner des biens (dons en nature) ou des prestations de service (mécénat de compétence ).

On retiendra qu’en l’état actuel de la loi du 21 avril 1928 et de ses quelques évolutions, les possibilités pour une structure destinée à faire appeler à la générosité du public se limitent à l’association reconnue d’utilité publique et la fondation. L’une et l’autre demandent une procédure d’agrément exigeante, et un reporting annuel auprès du ministère de la Justice.

Leur champ d’activité est par ailleurs limité car les domaines d’intervention des associations et des fondations RUP est restreint, tout comme les investissements autorisés pour la fondation, qui ne peut posséder que les immeubles nécessaires à l’accomplissement de sa mission.


Proposer des structures juridiques plus flexibles

Les propositions suivantes sont issues des caractéristiques françaises , mais on retrouve peu ou prou ces différentes formes juridiques en Europe: l ’association déclarée ou dite «loi 1901», l’association reconnue d’utilité publique, la fondation reconnue d’utilité publique, la fondation abritée et la fondation d’entreprise.

Si l’association et la fondation oeuvrent toutes deux pour l’intérêt général et ce, dans un but non lucratif, l’association se définit comme un groupement de personnes alors que la fondation est avant tout une affectation irrévocable de biens, droits ou ressources.

L’association déclarée est sans conteste la forme la plus répandue en France, ce qui s’explique par la simplicité de sa constitution et la grande liberté contractuelle dont bénéficient les membres fondateurs pour organiser son fonctionnement et l’exercice de ses activités.

Sa capacité juridique est cependant restreinte car elle ne peut en principe recevoir que des dons manuels et ne peut posséder que les immeubles nécessaires à son activité. En obtenant par décret en Conseil d’Etat, sa reconnaissance d’utilité publique, l’association bénéficiera alors d ’une capacité juridique élargie (notamment recevoir des libéralités ) et surtout d’une aura renforcée auprès des donateurs.

La lourdeur, la complexité et le caractère aléatoire de la reconnaissance de l’utilité publique sont en partie responsables du faible nombre des associations et des fondations de ce type. Cependant, d’autres types de fondation offrent plus de souplesse et connaissent actuellement un certain succès.

Ainsi, la fondation «abritée» ou «sous égide» est en fait l’affectation de biens auprès d’une fondation reconnue d ’utilité publique habilitée à cette fin par ses statuts qui va les gérer selon la volonté des donateurs sans que soit créée une personne morale distincte.

Autrement dit, la fondation abritée est un «compte de fondation» ouvert auprès d’une fondation abritante. Les modalités de constitution, de fonctionnement et de dissolution sont donc logiquement déterminées par la fondation abritante.

Les principales fondations abritantes sont la Fondation de France, l’Institut de France ou encore la Fondation pour le Patrimoine, mais cette pratique se démocratise et depuis quelques années bon nombre de fondations reconnues d’utilité publique adaptent leurs statuts pour pouvoir ainsi «héberger» des fondations.

La fondation d’entreprise est elle une personne morale à but non lucratif constituée par certaines formes de sociétés ou organismes en vue de la réalisation d’une oeuvre d’intérêt général . Au regard de la fondation reconnue d’utilité publique, la fondation d ’entreprise se caractérise notamment par une procédure de constitution plus rapide et locale, une affectation de ressources moins élevées (150 .000 euros sur cinq ans) et une durée de vie limitée (cinq années) mais prorogeable.

Cette forme de fondation rencontre depuis la réforme du mécénat un véritable engouement auprès des entreprises qui l’utilisent pour structurer, personnifier et sécuriser leur politique de mécénat tout en profitant des avantages fiscaux. Surtout, ses souplesses de constitution et de fonctionnement ont permis de démocratiser la pratique du mécénat dans le monde de l’entreprise.



Redaktion wort.lu Letzte Aktualisierung: 16-04-2008 17:34

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